Car si autrefois, on passait directement de l’enfance à l’âge adulte, les Lumières marquent un véritable changement de paradigme. Des ouvrages marquant du XVIIIe siècle comme
Les Aventures de Télémaque et
Emile ou De l’éducation attestent alors de l’importance prise par l’instruction et donc de l’adolescence. D’abord une préoccupation de l’aristocratie, elle devient peu à peu celle de la bourgeoisie. L’adolescence est le moment charnière de construction sociale et individuelle avant le passage dans le monde adulte. C’est dans les années 1950 que la jeunesse apparait réellement comme une catégorie sociale. Comment expliquer ce syndrome de Peter Pan ? Pourquoi les adulescents existent-ils ?
Alors que grâce aux progrès de la médecine, la durée de vie s’allonge partout dans le monde, le vieillissement semble de moins en moins bien perçu par les sociétés occidentales. D’abord porté par la génération des baby-boomers, le discours « jeunisant » est aujourd’hui dominant. L’entrée dans l’adolescence est de plus en plus précoce en raison de l’autonomie croissante accordée aux enfants, de réseaux sociaux qui explosent et qui exposent. Les parents ont moins prise sur leurs progénitures, rendant la transmission plus difficile. François de Singly utilise le terme d’ « adonaissants » lorsque les enfants n’attendent pas la traditionnelle « crise d’adolescence » pour rechercher de l’autonomie et leur propre voie. Les parents les pensent toujours à la maison alors qu’ils sont déjà « ailleurs » en train de débuter leur quête du graal « émancipation ». Pour autant, cela ne signifie pas que la sortie de l’adolescence se fait tôt. Détrompez-vous. C’est même l’exact inverse qui se produit. Comment expliquer cela ? Massification scolaire, allongement de la durée des études, recul des échéances traditionnelles de la vie d’adulte… Les causes sont diverses et multiples.
Le monde adulte instable ne pousse pas au grand saut. Les rites de passage traditionnels de la vie adulte sont sans cesse remis à plus tard. Dans Sociologie de jeunesse. L’entrée dans la vie (1991), le sociologue Olivier Galland évoque une « individualisation du passage à l’âge adulte ». C’est le cas pour des marqueurs bourgeois comme le mariage et indirectement la fondation d’une famille. Le mariage est vécu comme un engagement trop engageant et les enfants comme un engagement trop… « chiant » pour la vie de couple. Pour le psychologue américain Keith Campbell, ces changements font partie de la culture de l’« adulthood optional ».